- Equipe Grenet -

Préliminaires

     Le mardi 12 août 1941 à 9 heures, 31 gars étaient réunis Rue Cornélie Gémond : Bureaux et Direction du Mouvement Jeunesse et Montagne.
Après diverses formalités, 20 de ces jeunes volontaires furent affectés au Centre de Beaufort, les autres à St Bon. Nous restâmes encore le mercredi pour l'habillement et nous sortimes le jeudi matin à 7 h 18, nous étions tout joyeux de partir car notre séjour au Centre d'accueil de la Rue du Drac n'avait pas été très agréable.
Bref, après un voyage mouvementé où la plupart d'entre nous, faute de place, furent obligés de s'installer dans les W.C, nous arrivâmes à Albertville à 9h 40.
Nous étions un peu désemparés et nous attendions le car qui devait nous mener à Beaufort, le car partait à 11 heures, grande affluence encore, nous montons sur "l'impériale" et nous voici à Beaufort...
Repas froid composé de sardines et de pain, tel fut notre dîner ce jour là ; nous allons ensuite au Bureau nous présenter au Chef Testot-Ferry commandant le Centre de de Beaufort. Il nous pose diverses questions sur nos goûts pour la montagne , comment nous avons connu le Mouvement.
Demain matin, vendredi 15 août, nous devons rejoindre notre chalet qui se trouve à 11 km de Beaufort au lieu dit "Chapelles St Guérin". Vendredi 15 août.

     Partons de Beaufort à 9 heures, la mule nous monte une partie de notre paquetage jusqu'à un pays situé à 5 km de Beaufort, Arêches.
Ensuite, nous reprenons nos affaires et nous attaquons la montée de 6 km qui doit nous mener à St Guérin. Nos 2 chefs sont avec nous : Le Chef de Groupe Guers et le Chef adjoint Desjoyaux.
Nous arrivons à St Guérin vers 13 heures. Nous commençons par nous installer sommairement.
Deux cuisiniers s'offrent : Flacher Jean et Serre Pierre ; vers 15 heures nous faisons un succulent repas qui nous fait oublier la fatigue de la montée. Maintenant nous sommes attablés pour la corvée de légumes, le premier épluchage ! Pour quelques-uns, c'est un problème aride.
Nous continuons à nous installer, nous sommes dans un magnifique chalet suisse qu'une Société catholique de Paris a fait bâtir en 1937. Ce chalet était réservé à une Société scoute de Paris ; depuis la guerre et maintenant que ces scouts sont en zone occupée, il a été loué à des colonies de vacances. Depuis quelques temps, le Mouvement de Jeunesse et Montagne l'a loué et c'est aujourd'hui vendredi 15 août que le Groupe de St Guérin est fondé.

Samedi 16 août 1941

    Le lever aujourd'hui est à 7 h ¼. Nous déjeunons et la matinée est libre ; l'après-midi nous allons chercher un mât pour les couleurs que les deux spécialistes Maresca (Chamonix) et Dussert Jh (Chabotte) ont abattu dans la coupe de bois qui nous a été allouée.
Vers 18 heures, le chef Guers nous fait un discours sur la façon de se comporter, sur notre tenue physique et morale, sur les marques extérieures de respect.
A 19 h nous allons à la soupe ; à 12 h nous avons mangé une bonne fricassée de veau et des belettes.
Dimanche 17 Août.

     Nous ne nous levons qu'à 8 heures ; après le déjeuner : salut aux couleurs dans un site magnifique. A 12 h nous revenons et nous faisons un très bon dîner (sardines, veau, bettes et poires) précédé d'un morceau de beurre chacun.
L'après-midi, allons au col du Coin (2409 m) avec notre chef. C'est une ballade fort intéressante et pas très fatigante.
Le soir nous ramenons les couleurs.
L'horaire journalier a été fixé : lever 6 h 30, décrassage, couleur à 7 h 30 (après le petit déjeuner), travail 8 h à 12 h, déjeuner, travail 14 h à 18 h30, dîner 19 h, couleurs, coucher 22 h.

Lundi 18 août.

     Réveil rapide puis décrassage. Pour petit déjeuner nous aurons le café au lait puis un morceau de fromage.
Aujourd'hui, c'est notre première journée de bûcheron, nous abattons une quinzaine de sapins que nous ébranchons ensuite. Nous arrivons à midi avec une faim de loup.
Après avoir mangé des tomates, de la viande et des choux, nous nous reposons dans les prés environnants jusqu'à 14 h.
Sous la conduite du chef Desjoyaux nous allons démonter un baraquement à 200 m d'ici, afin d'en récupérer les panneaux.
Vers 4 h ½ la pluie nous surprend, nous rentrons au chalet. A dîner : patates sautées, navets et fromage. Baldet Raymond fait rire toute la table avec ses réparties.

Mardi 19 août.Lundi 18 août.

     Aujourd'hui il pleut à verse. Nous sommes dans la chambre, puis nous allons au réfectoire entonner, tous en chœur, des chansons de route sous la direction de Serre qui, ancien Compagnon, fait office de meneur de jeux.
Un volontaire (Salley) est allé chercher du pain à Arêches avec la "Rousse" (c'est le nom charmant de notre mule).
L'après-midi, la pluie a cessé, nous allons à 6 continuer le démontage du baraquement, la pente est rapide, les chutes sont nombreuses.

Mercredi 20 Août.

     Allons au bois où la pluie nous surprend, revenons trempés.
Ce soir, nous devons recevoir le Chef du Groupement Savoie, le Chef du Centre de Beaufort et le docteur du Mouvement.
L'après-midi, nous balayons et mettons en ordre le chalet.
Vers 17 h 30, les chefs arrivent, nous mangeons formidablement bien (porc frais, purée, potage, pêche, lait caillé, café et 1 L de vin à 6. Le chef Rougevin-Ville nous fait une conférence sur le Mouvement, ensuite nous reprenons en chœur nos chansons, nous faisons des bans, tous nous sommes gais (nous n'étions plus habitués au vin).
Ensuite nous montons préparer nos affaires, car demain nous devons partir pour Roselend.

Jeudi 21 Août.

     Le temps est incertain, nous n'allons pas à Roselend. Nous allons au bois, il est vraiment beau de voir les bonds fantastiques que font les sapins en tombant.
A midi, nous avons avec nous un scout qui est venu à St Guérin pour quelques jours.
L'après-midi nous retournons à notre travail, nous nous mettons torse nu car il fait une chaleur torride.

Vendredi 22 Août.

     Mauvais temps. 6 volontaires descendent à Arêches pour y chercher le ravitaillement que n'a pu monter notre mule, que nous maudissons, car le soir nous sommes obligés d'aller à sa rencontre. A l'intérieur du chalet, il y a grand branle-bas, on commence à installer les couchettes superposées.
L'après-midi il y a du brouillard ; vers 3 h ½ une éclaircie, nous retournons au baraquement et l'on ramène des panneaux et des planches.

Samedi 23 Août.

     Après le déjeuner, Bertrand, Serre, Lapierre, Dubois, Flacher et Barbier sont à Arêches pour y chercher des carottes, des patates et des choux. Il fait chaud pour remonter, en arrivant nous avons le déjeuner qui nous attend, ma foi, très tentateur (agneau, patates, bettes et pommes) !!.
L'après-midi nous allons nous baigner dans le torrent, Mussy se jette dans un trou pour attaquer un crawl puissant mais ses genoux, ses jambes sont freinés par les cailloux. Pauvre Marcel, tu te croyais à la piscine municipale de Grenoble ! Plus loin, Toby (Enjoubert) trempe élégamment ses pieds dans l'eau fraîche du torrent.

Dimanche 24 août.

     Les jeunes de St Guérin descendent à Arêches ; aujourd'hui ils vont acheter des affaires diverses.
A 18 h, tous nous sommes réunis dans le réfectoire où, en attendant l'heure du souper, nous chantons et gesticulons.

Lundi 25 Août.

     Aménagement intérieur et extérieur du chalet.
A midi nous avons du vin.
L'après-midi, un volontaire de Beaufort (Pagliero), vient nous couper les cheveux.

Mardi 26 août.

     Au petit déjeuner, nous avons du fromage.
5 gars vont au bois, les autres au baraquement.
A 12 h nous avons une visite, c'est un ingénieur électricien qui nous fait une conférence sur les installations électriques du Beaufortain.
L'après-midi, il pleut terriblement, nous restons dans notre chambrée, nous sommes quelques-uns (Serre, Enjoubert, Lapierre) à nous faire des pansements humides. Est-ce le changement d'air ? Les moindres égratignures se mettent à suppurer.



Vendredi 29 août.

     Aujourd'hui, réveil à 7 h ¼ car les gars sont fatigués de leur ballade au Grand Mont.
La journée se passe à débiter des troncs, à les faire descendre et à abattre d'autres sapins morts.
Le soir, nous mangeons une succulente soupe à l'oignon accompagnée de patates sautées.

Samedi 30 Août.

     Le travail en forêt continue, nous en mettons un coup pour mettre du bois en réserve car nous devons aller à Roselend pour y construire deux chalets pour cet hiver.
Le soir, le chef Desjoyaux nous parle de la montagne et nous annonce que nous allons avoir 600 g de pain à partir du 1er septembre (nous accueillons cette nouvelle avec joie). Il nous dit que nous serons piqués mardi.


Dimanche 31 Août.

     Des volontaires vont passer la journée à Arêches, d'autres restent pour écrire et pour se livrer à des raccommodages délicats. Déjeuner : viande, pommes de terre, poires.
Ce soir nous devons aller faire un feu sur la colline à l'occasion de la fête de la Légion. Nous partons à 22 h 30 ; pendant ce temps, Serre nous prépare une soupe aux oignons et au fromage.
Nous sommes de retour à 1 h 30 et nous avalons cette soupe avec grand plaisir.