- Equipe Vincent I -


Dimanche 4 Janvier
     Le tenant de ces lignes est rentré à St Guérin hier. Il a trouvé un effectif très réduit mais après son retour, le chalet ne lui a paru que plus sympathique. L 'après-midi quelques-uns ont fait leur débuts en ski, les autres se sont remis à leur sport favori.


Lundi 5 Janvier
     On ne commence pas encore l'école de ski, on coupe du bois devant le hangar. Le soir arrivent de nombreux permissionnaires. Barneau, complètement remis par le soleil de Marseille a quitté la "Bonne Mère" et nous a rejoint. Carteron rentre aussi, il a perdu - tenez-vous bien - 3 jours - je dis trois jours - de permission.


Mardi 5 Janvier
     Le chalet a repris son animation, le temps est froid et sec, les feux ronflent, aussi faut-il couper du bois, tant qu'on peut. Le soir, Martin-Lalande arrive pour piquer...


Mercredi 7 Janvier
     Lemoine arrive à son tour. Il a demandé un billet de chemin de fer pour Guéret à la bibliothèque, puis à la consigne, mais heureusement il était arrivé considérablement en avance et un employé généreux lui a indiqué le guichet.
Grâce à la complaisance des agents de la S.N.C.F. il est monté dans le train presque malgré lui et a pu arriver à Guéret à bon port. Mais, fait étrange, la maladie serait-elle contagieuse, comme Carteron il arrive de permission avec 3 jours d'avance. Vraiment Carteron et Lemoine devront être classés hors concours.


Jeudi 8 Janvier
     Les hommes quittent le chalet. Demain, Hornilh va à Pralognan, Carteron et Lemoine partent à la troupe à Uriage, auxquels vient se joindre Pfeiffer qui ne se sent plus de joie ; il aurait embrassé le bienfaiteur qui lui a permis de rejoindre la troupe.


Vendredi 9 Janvier
     Carteron a profité de sa dernière nuit pour "em ... " Fouchères jusqu'au bout. La "troupe" est partie pour Uriage par le car d'une heure.
Hornilh est resté en rade, il ne partira que demain : on l'a fait descendre un jour trop tôt.


Samedi 10 janvier
     Ceux qui ne sont pas encore descendus à Beaufort, toucher leur frais de déplacement, s'y précipitent avant qu'il n'y ait plus d'argent.
Les cours de ski ont commencé ce matin. Hier soir, pour l'ouverture officielle de leur saison de ski, le chef Mollier-Camus nous a exposé la méthode Française et la question du fartage.


Dimanche 11 janvier
     R. A. S.


Lundi 12 janvier
     L'école de ski marche à plein. Barneau imite à merveille les personnages de Samivel, mais il perd rien de sa dignité.


Mardi 13 janvier
     Tout le monde est sur les planches. Serre fait des progrès et quels progrès ! Je suis content de moi nous affirme-t-il avec énergie tous les soirs. L'équipe des non-débutants lâche les carres. Dérapage latéral ! Quoi de plus simple ? Position de descente en traversée, corps droit, aucun mouvement sauf le petit jeu des genoux pour lâcher les carres et laisser descendre. Essayez puisque c'est simple !


Mercredi 14 janvier
     Ecole de ski. Les talons commencent à s'écorcher sérieusement. Notre grand conférencier Falcoz brille sur un sujet historique : "Richelieu".


Jeudi 15 janvier
     Les deux groupes de skieurs poursuivent leur instruction à outrance. Fouchère dirige le premier cercle d'etudes sur "La place de la Jeunesse dans la nation française". L'atmosphère y est : la discussion marche bon train.


Vendredi 16 janvier
     Les chefs sont descendus à Beaufort. L Ecole de ski continue, dirigée par les précieux aides-moniteurs. Ils remontent deux grandes nouvelles
1°) l'équipe des skieurs "qui se débrouillent" partira samedi prochain pour N.D. de Bellecombe et Crest-Volant.
2°) Beaufort a besoin de bois, nous devons aller abattre 39 arbres marqués entre le col du Pré et le Crêt Guéret.


Samedi 17 janvier
     Course de fond. Péchoux enlève de beaucoup la 1ère place dans un style "impecc". Charavin, pauvre hernieux, râcle sa guitare à longueur de journée.


Dimanche 18 janvier
     Les enragés s'élancent sur la magnifique piste de slalom. Le chef Seguin manquant un virage fonce "schuss"!. Mais hélas ! Le retour à la piste malheureux se traduit par un soleil. A défaut de Pourchier le dos de Loth sert de traîneau. Mais ce n'est rien de bien grave : muni de béquilles en duralumin notre blessé peut descendre pour assurer la bonne marche des fonctions naturelles.


Lundi 19 janvier
     Ecole de ski.
Le chef Guers nous fait un exposé complet sur la géographie du Beaufortain. Cercle d'étude sur "le Travail". Falque est sur la sellette. Du point de vue théorique, idéaliste : peu de controverse. Quant au point de vue pratique, c'est un problème vraiment trop complexe pour être discuté.


Mardi 20 janvier
     Ecole de ski
Ceux dont les pieds écorchés se refusent à chausser des souliers, coupent du bois. Les feux dévorent.


Mercredi 21 janvier
     Dernière piqûre pour une partie du chalet. Le malheureux Niçois qui succède à Martin-Lalande ferait mieux de lui emprunter son coup d'aiguille dans le dos des volontaires, au lieu de dénigrer son digne prédécesseur ... dans le dos aussi.
8 volontaires, conduits par le chef Guers et le chef Mollier, vont à la coupe de bois au col du Pré. Ils sont partis à ski sur la neige, mais pour arriver ils ont du skier sur l'herbe, les cailloux et les arbres.
Weller fait le rossignol perché sur la plus haute branche (elle n'est qu'à 50 cm du sol). Il a fallu parcourir en long et en large les parcelles 28 et 29 por y trouver quelques troncs à abattre.


Jeudi 22 janvier
     Une équipe de 6 monte au col du Pré, par le Boudin, cela vaut tout de même mieux.


Vendredi 23 janvier
     Une autre équipe de 6 va au bois. Le chef de Montmarin vient visiter le chalet et déguste avec plaisir la cuisine à Weller.
Il entend nos deux harmonicistes Loth et Weller, mais notre distingué guitariste Charavin vient de partir pour se faire opérer. La mine poupine et réjouie manque au chalet.


Samedi 24 janvier
     L'équipe de skieurs n°1 part joyeusement pour N.D. de Bellecombe, suivie par une équipe de 6 qui s'en va au bois.
Mais à 2 km du chalet : "Avalanche, lâchez les dragonnes, à 10 mètres les uns des autres, silence !".
Au "Gérard", tout le monde fonce sur Arêches ; la neige cingle, on n'y voit rien. A Arêches, le chef Guers décide de ne pas aller plus loin. On attend le "miaule" pendant 3 heures, puis nous l'escortons jusqu'au chalet, sous la neige. Un groupe a déblayé les avalanches et l'on arrive pour déjeuner à 4 heures.


Dimanche 25 janvier
     Il neige toujours... Nous arrivons "au mètre". On dégage le devant du chalet pour le salut aux couleurs, et le toit du hangar. Personne ne descend au courrier. Le chef Mollier n'est pas remonté.


Lundi 26 janvier
     Il neige toujours. Personne ne descend au courrier. Tandis qu'une équipe dégage le chemin du hangar et fait du bois, l'autre prépare un... dégagement pour le soir. Chants, charades, exercices de force .. plus ou moins truqués : Loth soulève à la force des poignets, ce pauvre Weller qui reste pendu par les pieds.
Opéra bouffe : "le Petit Roi Edgard". Le Roi Edgard (Barneau) assume les lourdes charges du royaume d'Arcadie. Pendant ce temps, "sa chère Reinette" (Valla) le trompe avec le confident. Vaincu par sa douleur, il démissionne et son fils, plutôt turbulent (Weller) est "appelé à régner" - Drôle de nom pour un roi, remarque le bouffon (Fouchère)


Mardi 27 janvier
     La neige a cessé de tomber. Les 2 équipes, à tour de rôle, déblayent les routes et font du bois. On arrive au tournant des "Amis".


Mercredi 28 janvier
     Il neige encore, mais bientôt cela se dégage un peu ; le délaiement de la route se poursuit. Les 12 pelles ne chôment pas, les avalanches à 2 km d'ici sont déjà sérieusement entamées.


Jeudi 29 Janvier
     Les "déblayeurs" poursuivent activement leurs travaux. Nous approchons des "Gérards". Le moniteur Mollier est pleinement satisfait et nous annonce que nous aurons ouvert la route avant les gars du Planey qui eux aussi"cassent des manches de pelles".
"Travaillez, cassez des manches" ! C'est Mochet qui en manque le moins !! M. Mochet est un honorable quincailler de Beaufort qui vend aussi ces ustensiles appelés manches et que nous connaissons tous.


Vendredi 30 Janvier
     A la neige ! A la pelle !! Cris de ralliement convient les gars de St-Guérin à continuer leur tâche. "L"appel de la Route" comme dit, avec son sourire inaltérable, le chef Seguin. A la tombée de la nuit il ne reste plus que quelques dizaines de mètres avant d'atteindre les Gérards. Demain ce sera fini.
Le trio Carteron, Lemoine et Pfeiffer, reçus à leur stage d'Art dramatique, reviennent chercher leurs affaires, ils repartent demain pour conquérir les "planches". Le soir ils nous donnent un dégagement fort bien réussi d'ailleurs. Qu'on se le dise ! Falcoz en est tout éberlué, il a l'air de reconnaître les qualités comédiennes de Pfeiffer !
Le trio plein d'entrain nous présente le Chant de J.M., la voix mâle de Lucien (Pfeiffer pour les profanes) empoigne l'auditoire. Puis Carteron et Lemoine nous présentent un sketch : le Chapeau, sketch suivi d'un numéro comique et muet de Lemoine : "impressions" que ressent le spectateur devant un spectacle gai, triste ; les réactions furent d'ailleurs magistralement interprétées par notre ami.


Samedi 31 janvier 1942
     Le tenant de ces lignes, étant de cuisine, n'a pu se rendre compte de l'avance du travail accompli ce matin.
Le soir, une mauvaise nouvelle : Serre, Baldet et Barbier de retour de Beaufort nous annoncent que de nouvelles avalanches ont coupé la route à maints endroits. Les 3 pauvres gars sont exténués et ont bien cru ne plus revoir le chalet, les avalanche les ont rasé. Baldet, hirsute, aurait bien eu besoin d'un petit coup de rasoir, sans pour cela être englouti à jamais dans la neige glacée.

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